Lu dans le célèbre quotidien sportif
Qui veut de Nantes ?
La vente du club a été évoquée hier par le groupe Dassault, son propriétaire actuel.
DEPUIS LA NOMINATION de Serge Le Dizet comme entraîneur, le 3 janvier, Nantes travaille à son redressement dans la discrétion. Tout du moins pour le secteur sportif. Car, côté bureaux, l’ambiance est plus que morose.
Si Jean-Luc Gripond, le président, consent des efforts sans doute trop tardifs pour redorer son image écornée, la Socpresse, le propriétaire, continue à souffler le chaud et le froid.
Hier, un texte diffusé par l’AFP et émanant de la Socpresse a nettement éclairci la position du groupe Dassault (dont fait partie la Socpresse). «
Il ne semble pas que le FC Nantes constituera un élément stratégique dans l’avenir, analyse Xavier Ellie, président du comité du groupe Socpresse. Il faut s’attendre à plus ou moins long terme à une cession, qui ménagera les intérêts légitimes de l’actionnaire, du club, du centre de formation et de la ville de Nantes. »
Bien conscient de la crise qui se profile avec les salariés du FCNA, dont l’intérêt n’est pas évoqué, Jean-Luc Gripond devrait se fendre aujourd’hui d’un communiqué pour préciser que la prise de position de M. Ellie ne correspond pas à la réalité : «
Rien n’est changé. Mes patrons me l’ont confirmé. Je sais qui prend les décisions et cette personne (M. Ellie) n’en fait pas partie.
Que le football soit original dans l’organigramme de la Socpresse, ce n’est pas nouveau. Nous continuons à travailler à un projet global. »
Le statu-quo est donc le mot d’ordre officiel. «
Je n’ai rien à déclarer à ce sujet, nous a indiqué, hier, Serge Dassault.
Nous sommes effectivement en cours de réflexion. J’attends les résultats de cette réflexion avant de me prononcer.» La prudence relative de l’actionnaire et du président du FCNA répond à une logique purement économique.
À ce jour, aucun dossier de reprise concret ne leur est parvenu. Ils savent, en revanche, que plusieurs repreneurs potentiels peaufinent leur dossier. C’est le cas notamment
d’Alain Florès, l’ancien directeur général, qui a participé au renouveau du club en 1992. «
Le dossier avance avec un partenaire financier sérieux, un groupe français et européen, des partenaires locaux et régionaux et un partenaire sportif nord-américain, explique l’intéressé.
C’est un processus de reprise. C’est donc un peu long. » Florès évoque «
des partenaires de très haut niveau » avec lesquels il a «
des engagements formels ».
Le groupe
France-Antilles, via sa filiale de journaux gratuits Paru Vendu, restait également en course ces derniers jours.
Jean-Claude Darmon est un autre candidat sérieux, même s’il se montre très discret. L’ancien patron de Sportfive ne jouit pas des faveurs de la mairie de Nantes. Or, celle-ci aura son mot à dire. Propriétaire de la Beaujoire et de La Jonelière, le centre d’entraînement, qu’elle met à disposition du FCNA via une convention, elle a le pouvoir de bloquer le processus de vente si le nouvel actionnaire ne lui convient pas.
Budzynski
voulait partir
Un peu comme au début des années 90, la très mauvaise passe actuelle de Nantes mobilise en tout cas les énergies.
Président de la branche Europe du Nord et de l’Est d’Otis (fabriquant d’ascenseurs) mais aussi de sa filiale française,
Bruno Grob est, selon ses propres termes, «
un amoureux du FC Nantes, de son jeu et de sa façon de voir le football depuis 30 ans » . Il jure qu’Otis « n’investira jamais de la vie » dans un club defootball. En revanche, à 55 ans, il se dit prêt à apporter ses compétences et son carnet d’adresses, qu’on dit très épais, au club de son cœur. Sous quelle forme ?
Dans ce contexte mouvant, l’attentisme est de rigueur. Robert Budzynski, dont les divergences de vue avec Jean-Luc Gripond deviennent chaque jour plus profondes, a envisagé de quitter son poste de directeur sportif à la fin du mois. Il s’est semble-t-il ravisé. Mais la poursuite de sa collaboration, qui devait être évoquée en janvier, reste pour le moment incertaine.
Un défenseur latéral «
immédiatement compétitif » , comme le demandait Le Dizet, devait être engagé. Au moment du départ de Mathieu Berson, à l’été 2004, Gripond avait d’ailleurs promis que le produit de la vente du milieu défensif serait réinvesti pendant le mercato. Le FCNA aurait pu enrôler El-Fakiri,moyennant un million d’euros. Il n’a pas bougé. Si Diallo est arrivé, Ahamada, Grondin et N’Zigou ont fait leurs valises. Nantes donne d’avantage l’impression de vouloir présenter un bilan acceptable qu’un plan de développement durable. Cette stratégie est assez cohérente quand on veut vendre une entreprise.
Lors de la dégustation de la galette des rois du club, début janvier, Jean-Luc Gripond avait répondu aux questions que les salariés du club avaient déposées préalablement dans une urne. En substance, le président nantais leur avait indiqué qu’il n’allait perdre «
ni son temps ni sa crédibilité » au club s’il n’avait pas «
une vision claire. » Il liait son éventuel départ à la réponse des actionnaires du club et avait annoncé des éclaircissements mi-février, puis quinze jours plus tard. En laissant filtrer ses intentions, sans vraiment les affirmer, la Socpresse est dans le timing.
RAPHAËL RAYMOND
et JEAN-DENIS COQUARD