La rumeur avait pris beaucoup d’ampleur depuis qu’elle avait été relayée par des médias qui suivent soit le Chicago Fire soit la MLS de très près, avec des sources fiables, comme The Athletic. L’information est devenue officielle ce matin : le médian américain Djordje Mihailovic quitte Chicago pour Montréal, qui n’a pas hésité à délier les cordons de sa bourse pour l’acquérir.
En effet, il pourrait coûter jusqu’à un million de l’allocation monétaire de base du club : 400 000 $ en 2021, la même somme la saison suivante, et la moitié si certaines conditions (non dévoilées) sont remplies. À titre de comparaison, c’est proche de ce que DC United avait consenti à donner pour aller chercher Julian Gressel. Et ce n’est pas tout : le joueur a signé un contrat de trois ans, avec option pour une saison supplémentaire, et une partie de son salaire sera déboursé grâce à l’allocation monétaire ciblée - il est ce qu’on appelle communément un “joueur Tam”. Mais qui est donc ce petit prodige sur lequel l’Impact mise gros ?
Malgré son nom à consonnance serbe, il est né aux États-Unis, où son père Aleks a étudié dans les années 70 avant de recevoir un contrat en NASL, où il n’a guère joué. Mais il a bel et bien fait carrière dans le soccer, entre Jacksonville, lieu de naissance de Djordje, et l’Illinois, où il a fondé son propre club, le Chicago Blast, que son fils a fréquenté à partir du jour où il a pu intégrer la plus jeune des catégories d’âge.
À 15 ans, le grand club de la ville le repère, et voilà qu’il passe dans les équipes de jeunes du Chicago Fire, avant de passer en équipe première en 2017, à 18 ans et 2 mois. Après quelques entrées au jeu de courte durée, il célèbre sa première titularisation en août… au stade Saputo. Il y est passé relativement inaperçu, contrairement au but célébré par Piatti les mains derrière les oreilles…
Déjà très connu et très apprécié de ceux qui suivaient les équipes de jeunes américaines, Mihailovic était très attendu, malgré son jeune âge, mais a mis du temps à se mettre en valeur dans un club, il faut le dire, où les points d’interrogation semblaient toujours nombreux. Ainsi, tant en 2017 qu’en 2018, il a surtout reçu sa chance comme titulaire en toute fin de saison (il faut dire qu’il a fini 2017 sur une grave blessure). Et l’année suivante, s’il a eu beaucoup plus de temps de jeu, ses trois buts et ses deux passes décisives pouvaient laisser planer certains doutes sur sa contribution.
Tout a changé en 2020, grâce entre autres à l’arrivée d’un homme : l’attaquant Robert Beric. Les deux joueurs ont formé le meilleur duo offensif de MLS lors de la saison régulière, puisqu’ils ont combiné ensemble (l’un à la dernière passe, l’autre à la finition) lors de six buts, dans des circonstances très différentes : du centre pour la tête à la passe en profondeur, de l’action construite à la contre-attaque. Est-ce à dire que l’IMFC a dans sa mire un attaquant du style de Beric ?
Quand on regarde les buts auxquels Mihailovic a contribué depuis ses débuts en MLS grâce aux informations fournies par Vision du Jeu, on constate qu’il est avant tout un créateur mais a aussi le sens de la finition, puisqu’il a donné la dernière passe à 11 reprises et envoyé 7 fois le ballon au fond des filets. Ses zones de prédilection sont l’axe du jeu et le côté gauche. De quoi laisser croire qu’après Taïder et Bojan qui se marchaient sur les pieds dans ces parages-là, en voilà un qui pourrait remplir les tâches offensives des deux réunis… Mais laissons à Thierry Henry le soin de l’intégrer au système qu’il veut mettre en place.
Les buts qu’il a donnés à Beric traduisent bien la variété de la palette du nouveau médian créatif de l’IMFC. S’il a davantage un penchant pour les combinaisons de passes au sol, il est capable de trouver assez facilement la tête de ses coéquipiers. Il aime tant glisser des ballons au cordeau que lancer un partenaire seul face au gardien adverse.
Il peut faire aussi mal de la zone entre le rectangle adverse et le rond central que quand il est à moins de 15 mètres de la ligne de fond. Et il a été à l’aise dans diverses configurations de plein jeu : constructions patientes, accélérations soudaines en possession de balle ou reconversions rapides. En revanche, il était très peu impliqué sur les buts sur phases arrêtées.
Ce qui vaut pour ses passes décisives est également vrai dans l’ensemble pour les buts qu’il inscrit lui-même, avec quand même un penchant plus marqué pour échapper à la défense sur une passe en profondeur et se retrouver en face-à-face avec le portier.
Hormis sa contribution sur phase arrêtée, les défauts qui ressortaient le plus dans ce qu’on disait de lui à Chicago étaient son manque de régularité (il peut briller lors d’un match, être invisible lors d’un autre) et le fait aussi qu’il pouvait s’éteindre au fil des minutes. Cela dit, il est du genre à ne pas attendre avant de rentrer dans son match. Des propos que les chiffres tendent à confirmer, puisque les deux-tiers des buts auxquels il a contribué ont été inscrits en première mi-temps.
Âgé de 22 ans depuis le 10 novembre dernier, Mihailovic ne manque pas de potentiel, et beaucoup de monde croit en lui, comme en témoignent ses six sélections en équipe nationale. Il arrive à un stade de sa carrière où il doit franchir une nouvelle étape, et tant lui que Montréal pensent que c’est le mariage idéal qui sera gagnant pour toutes les parties. On a hâte de voir ça dans les prochains mois !
