Fin de l’ère Olivier Renard au CF Montréal

Publié le 9 mai 2024

 CF Montréal
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Coup de tonnerre cette semaine : les chemins du CF Montréal et d’Olivier Renard se séparent. La rumeur, qui courait depuis deux jours, est devenue une information officialisée par le club ce jeudi soir dans un communiqué plutôt sommaire, qu’on pourrait résumer en : “On a été bien ensemble, mais là on se sépare”. Ce vendredi, Garbiel Gervais s’est expliqué devant les médias pour en donner quelques raisons, sommaires. Mais on attend évidemment aussi d’avoir la version du désormais ancien vice-président du club en charge de sa direction sportive.

Voilà, dès lors, ce qu’a déclaré le président du club quant aux raisons de la séparation : “Les derniers temps – je dirais des mois –, on avait des divergences stratégiques quant à l’application de la philosophie sportive. Il y avait un manque de consensus sur certaines décisions – que ce soit le fonctionnement du département, la structure organisationnelle ou le choix des joueurs. Je ne vais pas entrer dans les détails d’informations confidentielles.” Nous n’en saurons pas plus, rien de concret à se mettre sous la dent.

Comme de coutume quand il y a une situation pour le moins inattendue et qu’aucune explication n’est donnée, les supputations pleuvent. Il y en eut notamment des journalistes Tony Marinaro (premier à annoncer l’info), Tom Bogert (généralement très bien informé) ou encore, dans la presse écrite francophone, Jean-François Teotonio.

Tous, eux et les autres donc, avancent une explication similaire : le torchon brûlait entre Renard et le propriétaire Joey Saputo. Selon les versions, les divergences étaient plus ou moins fortes, dataient de plus ou moins longtemps. L’un des sujets de discorde – celui qui, selon certains, a constitué la goutte faisant déborder le vase – aurait été la demande de hausse salariale de Mathieu Choinière, pour qui Renard était prêt à débourser davantage que Saputo. Un dossier que Gervais a formellement refusé de commenter. Cela dit, ça semble bien léger comme cause de rupture, il y avait donc d’autres raisons et/ou problèmes.

Alors, quels étaient les pouvoirs réels de Renard, et les devoirs de ce dernier au moment de faire passer une décision ? Interrogé à ce sujet, Gervais a répondu : “En tant que président, toutes les décisions sont de ma responsabilité. Quand il s’agit de décisions stratégiques, il y a le conseil d’administration, les propriétaires : nous nous rencontrons souvent.” Là encore, on était davantage dans un discours de description juridique que dans des réalités concrètes.

Pour celles-ci, bien entendu, on doit donc se limiter aux suppositions. On vous laisse lire et écouter les principaux articles et commentaires d’importants médias francophones du Québec que nous avons compilés sur notre forum pour vous faire une idée plus précise par vous-mêmes.

Autre annonce du club : Gabriel Gervais assurera par intérim la direction sportive de l’organisation. On aurait plutôt imaginé le bras droit de Renard, Vassili Cremanzidis, la prendre en charge dans l’attente d’une nouvelle embauche. Voilà qui ouvre évidemment la porte à de nouvelles supputations, d’autant que les deux hommes ont assisté ensemble mercredi soir au match de Coupe du Canada entre Saint-Laurent et le Toronto FC… Avec Renard, exit aussi Cremanzidis ?

Non, selon Gervais, qui dit que Cremanzidis faisait toujours partie de l’organigramme du club au moment où il s’exprimait, ajoutant par la même occasion que les dissensions avec Renard étaient différentes de celles avec Wilfried Nancy à l’époque. En fait, il explique qu’avant de nommer un successeur, il veut peut-être redéfinir les rôles et, à cette fin, occuper le plus important d’entre eux est à ses yeux la meilleure façon d’avoir une vision globale : “Je vais prendre du recul pour analyser la structure de l’organisation sportive et définir la meilleure organisation pour faire avancer l’équipe. Je suis en réflexion des rôles et responsabilités que je veux mettre en place dans l’organisation sportive, comme je l’ai fait au niveau des affaires depuis mon arrivée. Je vais me baigner davantage dans le sportif (…) et ensuite on pourra cibler des candidats.”


UN BELGE QUI A RAVIVÉ LES COULEURS LOCALES


Arrivé lors de l’automne 2019, Renard était entré en contacts avec le club par l’entremise de Walter Sabatini, directeur sportif de Bologne, l’autre club de Saputo. Alors sous contrat avec l’Antwerp, plus vieux club de Belgique, Renard y a terminé les projets qu’il avait en cours avant de traverser l’Atlantique. À l’époque, on disait que les critères qui avaient poussé à son embauche étaient les suivants : expérience au poste de directeur sportif, expérience internationale, maîtrise du français, de l’anglais et de l’italien. Le fait qu’il “pense encore comme un joueur” était aussi apprécié en haut lieu.

Si son mandat à Anvers fut bref, il avait fait ses classes au Standard et à Malines, deux autres clubs belges, et dès son arrivée à Montréal, il a su s’adapter aux réalités de la MLS et eu des discours sans équivoque. “Je ne suis pas là pour me faire des amis, je suis là pour qu’il y ait des résultats. Et quand les résultats sont là, tu as des amis”, disait-il ainsi le jour de sa présentation aux médias.

Il y a aussi défini ses objectifs : “Mon but est de mettre la plus haute qualité possible dans le vestiaire, d’amener des joueurs qui sont un plus sportif et seront un plus financier. Un entraîneur, c’est pour ça qu’il s’appelle entraîneur, est là pour entraîner et faire progresser les joueurs.” Si sous Rémi Garde au poste d’entraîneur peu auparavant, on avait enfin vu des joueurs s’améliorer nettement sous le maillot du club (Samuel Piette en était déjà un brillant exemple), avec l’arrivée de Renard au poste de directeur sportif, ce n’était plus l’exception. Avec, pour point d’orgue, le triple transfert de Mihailovic, Johnston et Koné à la fin de la saison 2022, qui a bien rempli les caisses du club.

Si pour Renard, l’origine du joueur n’est pas gage de succès ou d’échec (“Si on peut trouver de bons joueurs de la région, auxquels les supporters s’identifient encore plus, tant mieux ! Mais si on va mettre 11 joueurs originaires de Montréal sur le terrain et qu’on perd tous nos matches, ça n’ira pas”), jamais n’avait-on vu autant de Canadiens, et de Québécois, dans l’effectif que depuis l’ère où les Américains comptaient encore comme étrangers en USL. Ère après laquelle nombre de ses prédécesseurs avaient pourtant été Nord-Américains, voire Québécois, et aussi paradoxal que cela puisse sembler à certains, le club avait eu du mal à conserver sa place dans la hiérarchie, même en USL.

Et ces joueurs n’étaient pas n’importe lesquels, puisque pas moins de six d’entre eux ont été sélectionnés pour la dernière Coupe du monde au Qatar ! Des locaux, oui – et plusieurs Québécois sur la liste, en outre – mais certainement pas pour moisir sur le banc. Comme quoi, ce n’est pas parce qu’il est Européen qu’un directeur sportif va obligatoirement privilégier les joueurs étrangers (Américains y compris)…

IDENTITÉ, HENRY ET NANCY


Concrètement, sa première décision aux yeux du grand public fut l’embauche de nul autre que Thierry Henry au poste d’entraîneur. Même si l’expérience de ce dernier au poste de T1 était légère (et pas forcément fructueuse), il avait obtenu beaucoup de succès en tant qu’entraîneur adjoint de l’équipe nationale belge. C’est d’ailleurs, et ce n’est peut-être pas une coïncidence, une partie de la philosophie de jeu de cette dernière qu’il a amenée dans ses bagages à Montréal – et notamment son système à trois défenseurs centraux, décrié par certains à ses débuts et qui a fait ses preuves par la suite, devenant immuable qui que soit l’entraîneur. Une volonté probable de Renard, puisque l’identité sportive demeura la même après le départ de l’ancien international français.

Mais à son arrivée, Renard a été très clair : pour que l’identité du club s’exprime, il fallait s’armer de patience, notamment pour remodeler l’équipe en conséquence et – ça, il ne l’a pas dit en ces mots – se débarrasser de contrats et de joueurs n’y correspondant pas (souvenez-vous de Maxi Urruti…) Ainsi, les premiers fruits de son travail devaient être récoltés au début de la saison 2021.

Néanmoins, entre temps, une pandémie est passée et Thierry Henry s’en est allé. Il fallait retrouver un entraîneur, et deux hommes ont alors fait preuve d’une grande témérité. À commencer par Wilfried Nancy, l’adjoint d’Henry, qui est allé voir Renard et lui a dit de but en blanc qu’il avait les qualités requises pour prendre la relève. Et le dernier nommé, qui lui a fait confiance et n’a pas embauché de grand nom, ni même d’entraîneur expérimenté avec une équipe première. On connaît la suite : après avoir fait ses gammes lors de sa première saison, Nancy a atteint le niveau espéré lors du début de la suivante avant de la terminer dans une stratosphère auquel pas grand monde ne s’attendait, permettant au club de réussir la meilleure campagne de son histoire en MLS.

Oui mais voilà, cette belle histoire s’est terminée abruptement quand l’entraîneur a pris la direction de Columbus. En raison, disait-on à l’époque (relisez l’article), de… dissensions avec Joey Saputo. Ce qui évidemment ne manque pas de faire bouillir la marmite dans l’esprit de certains observateurs et supporters, et de se faire demander à encore plus d’entre eux quel est donc cet ingrédient secret de la potion tragique dans celle du club qui fait que ce dernier a vu partir deux hommes forts appréciés en si peu de temps. Il est à noter que parmi les critiques de Saputo, certains lui reprochent paradoxalement dans le même temps de délaisser Montréal au profit de Bologne.

UN MANDAT ÉLARGI


Quelques mois plus tôt, durant l’été 2022, Renard avait signé un nouveau contrat, à durée indéterminée, au club. Ses tâches restaient les mêmes, mais son titre a changé puisqu’il est passé de directeur technique à vice-président et chef de la direction sportive. Une modification qui n’était pas que de façade puisque depuis lors, il siégeait en outre au comité de direction du club. Certains y voyaient même là un contrat “à vie” entre les deux parties. Malheureusement, la vie est parfois trop courte…

Parmi ses tâches, il est important de noter que le club lui avait demandé dès son arrivée d’accorder de l’importance aux jeunes, d’ici ou d’ailleurs, afin que leur niveau, et du même coup leur valeur, augmente durant leur passage au club. Pour, in fine, réaliser de bonnes opérations financières. Ce qui n’allait pas sans ambitions sportives puisque pour qu’un joueur soit vendu à fort prix, il faut qu’il soit très performant sur le terrain. La prolongation de son contrat était un signe évident de satisfaction à cet égard. C’est une part importante de la philosophie sportive du club “mise en place par Olivier Renard depuis plusieurs années, et qui ne change pas”, a précisé Gervais lors de son intervention.

On ajoutera à cela qu’en plus de son mandat officiel, Renard était fin communicateur et se faisait régulièrement entendre dans les médias. Certes, il savait quels messages il voulait porter, et sa “cassette” était bien rôdée, mais il était aux yeux du grand public aussi le véritable ambassadeur des relations publiques du CF Montréal pour la plupart des aspects les plus concrets de sa vie sportive. Il avait, sans mauvais jeu de mots, très bonne presse tant auprès des médias que du public. C’est un autre rôle qu’il faudra compenser avec son départ, d’autant que ça n’a jamais été une force du club, loin de là même.

MALGRÉ DES RATÉS, UN BILAN POSITIF


Bien entendu, l’ère Olivier Renard n’a pas été faite que de réussites. Le plus emblématique de ses échecs a sans aucun doute été Bjorn Johnsen, attaquant norvégien qui a empilé les buts dans d’autres compétitions et… le temps à l’infirmerie, sur le banc et en tribune à Montréal, malgré un salaire parmi les plus élevés du groupe de joueurs. Un aspect de son style de recrutement était à risque (souvent pour anticiper le départ d’un cadre de l’équipe) et a aussi vu l’arrivée de joueurs qui n’ont pas répondu aux attentes, tels Hamdi ou Miljevic, voire des “paris” qui semblent ratés, à l’image d’un Iliadis jusqu’à présent.

Autre reproche qui pourrait lui être fait, celui d’avoir laissé Hernan Losada se brûler avec un effectif trop léger (pour preuve, les renforts arrivés cette année – mais avec ce qu’on entendu récemment, on est en droit de se demander si Renard avait toute la latitude nécessaire) et de l’avoir sévèrement critiqué en fin de saison dernière (ce qui lui est totalement imputable). D’autres aspects de son travail sont encore en cours d’évaluation, à commence par l’embauche de Laurent Courtois et, justement, de certains nouveaux joueurs arrivés en début de saison.

S’il faudra donc encore un peu de temps pour faire un bilan complet et que plusieurs des derniers points cités font de l’ombre au tableau global, celui-ci est, quand on connaît l’histoire du club, l’un des plus réussis pour le travail accompli à long terme. On vous a déjà parlé de plusieurs arrivées importantes (on ajoutera, entre autres, Kei Kamara, malgré une fin tumultueuse, dans laquelle Renard a d’ailleurs été impliqué) et d’autres choix qui l’ont été tout autant, mais de façon isolée.

Quand on fait le bilan global des années montréalaises de l’ancien gardien hennuyer devenu dirigeant, c’est le mot “direction” qui ressort. D’un club qui semblait prendre ses décisions sportives au gré du vent avant son arrivée, il est devenu un club a l’identité claire – ce qui ne veut pas dire qu’elle plaît à tout le monde – tant dans le jeu qu’il veut proposer que dans sa façon d’être géré sportivement. Le CF Montréal a, grâce à Renard, franchi un cap important. Mais il suffit de regarder du côté de Toronto pour voir que perdre le dirigeant qui indique le cap sportif à suivre peut résulter sur une série de saisons catastrophiques.

Ainsi, le remplacement d’Olivier Renard doit être désormais au centre des préoccupations. Et, sûrement, des inquiétudes des supporters. Car va-t-on trouver quelqu’un qui sait ce qu’il veut aussi clairement (avec tant les bons que les mauvais côtés que ça implique), communique aussi efficacement et a une politique similaire ? Ou alors, va-t-on nous refaire le coup de Frank Klopas, embauché pour des critères aussi nébuleux que la qualité de l’équipe sur phases arrêtées sous ses ordres ?

D’autant que, malgré quelques bons coups (dont Gabriel Gervais, qui va devoir avoir les épaules larges dans un futur proche), la haute direction du club est réputée pour ne pas savoir quels éléments observer pour engager un dirigeant important ou un entraîneur. Et dans le cas qui nous occupe, le mandat n’est pas des moindres. Un nouvel intermédiaire ayant le nez aussi fin que Walter Sabatini serait plus que le bienvenu…
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