Un point sur quinze, quatre défaites de suite, la pire défense de la compétition avec 13 buts encaissés et la dernière place de la « clausura », deuxième partie de la saison 21/22 du championnat du Mexique : l’année 2022 a on ne peut plus mal commencé pour Santos Laguna, qui reçoit Montréal ce mardi. On a regardé ça de plus près pour tenter de comprendre ce qui cloche et, surtout, savoir à quoi s’attendre en Ligue des champions.
« Mal commencé » n’est pourtant pas l’expression la mieux appropriée pour la formation de Torréon cette année puisque malgré son bilan famélique, elle a ouvert la marque lors de… 4 de ses 5 rencontres ! Les supporters montréalais qui se plaignent que leur équipe est incapable de gérer une avance auront certainement des interlocuteurs pour débattre de la gravité du problème.
Malgré sa dernière place, Santos Laguna a marqué lors de chacune de ses 5 rencontres cette année, veut et sait jouer au ballon. Balle au pied, la volonté de construire est manifeste… en tout cas, avant que les filets adverses aient tremblé pour la première fois. Les buts de Santos Laguna ne tombent pas du ciel, ne résultent pas d’exploits individuels ou de ballons généreusement offerts par l’adversaire. Que l’équipe pose le jeu, essaye de partir en contre (souvent sans succès) ou profite d’une phase arrêtée, il y a toujours quelqu’un à la dernière passe qui cherche volontairement le buteur plutôt qu’un ballon qui bondit partout comme une boule de billard (je ne veux pas rappeler de mauvais souvenirs, mais disons qu’Urruti ne serait pas très heureux dans une telle configuration).
C’est en posant le jeu que le futur adversaire de Montréal s’exprime le mieux. Il n’est pas maladroit non plus sur phase arrêtée mais peine en revanche dès qu’il faut jouer vite. Certes, de temps en temps, on balance un long ballon, mais les reconversions rapides finement dessinées ou les accélérations soudaines qui cassent des lignes (vous savez, la spécialité de Mihailovic), ce n’est pas vraiment la spécialité de la maison.
Quand il domine, Santos Laguna aime porter le ballon haut, entre la ligne de fond et l’entrée du grand rectangle mais plus souvent à l’extérieur de celui-ci (donc sur les côtés). Ses joueurs ne rechignent pas à aller faire des appels jusque dans le petit rectangle, que ce soit dans le cours du jeu ou sur les phases arrêtées. Il y a une certaine mobilité, permettant de la présence de la tête ou au cordeau : si cela fait du monde à surveiller, le revers de la médaille est que l’équipe ne peut pas compter sur un buteur régulier (c’est peut-être d’ailleurs une façon de le compenser). Ainsi, les 6 buts marqués cette année l’ont été par autant de joueurs différents (dont un adversaire).
En revanche, à l’approvisionnement, il y a vraiment deux hommes à surveiller de plus près. Le joueur en forme de ce début d’année s’appelle Brian Lozano. L’Uruguayen de 27 ans évolue légèrement décalé sur la droite, où il se déporte souvent. Il a un excellent coup de patte, ce qui lui permet d’envoyer des centres vicieux, des passes bien dosées mais aussi des coups francs et des corners précis. Mais il n’hésite pas non plus à se recentrer de temps à autre pour tenter sa chance, notamment grâce à une bonne frappe à distance. Attention aussi à son compatriote Fernando Gorriaran, son pendant à gauche au sens du but toutefois moins aiguisé.
Après avoir lu ça, vous vous dites probablement : « Ohlala, mais ça ressemble à un adversaire redoutable, ça ! » Si on le laisse faire le jeu à sa guise, oui. Mais si on prend le jeu à son compte ou qu’on le voit se reposer sur ses lauriers, alors il y a moyen de lui faire très mal. Parce que vous vous doutez bien que si Santos Laguna a pris un point sur quinze en menant à la marque lors de quatre de ses cinq duels, c’est qu’une fois en avance, le navire chavire.
Treize buts encaissés, c’est tout simplement énorme. Commençons par une faiblesse notable dont on aime parfois débattre à l’excès à Montréal : les fins de mi-temps difficiles. En plus de deux buts encaissés dans les arrêts de jeu de la première période, les pensionnaires du stade Corona en ont encaissé quatre dans le dernier quart d’heure de ses matches. Doit-on déceler là un problème d’endurance ou de concentration ? Gageons que Wilfried Nancy et ses adjoints ont pu trouver la source du problème.
Le championnat du Mexique a une particularité : on y procède moins souvent en contre-attaque qu’ailleurs. Difficile dès lors de dire comment Santos Laguna se comporte en perte de balle, car ses adversaires essayent souvent de reconstruire à la récupération. Ce qu’on a en revanche pu constater, c’est que quand la défense se met en place pour attendre, ça tourne souvent à la catastrophe (ce qui explique peut-être pourquoi ce n’est qu’après avoir ouvert la marque que le bateau prend l’eau).
Enfoncer Santos Laguna, c’est quasiment la garantie de lui faire très mal. En posant le jeu et en portant le ballon bien haut, des brèches défensives éclatent de partout. Mais c’est principalement le flanc droit qui est poreux : autant Lozano y apporte le danger offensivement, autant derrière, l’entraîneur Pedro Caixinha n’a trouvé ni la formule ni l’homme providentiel. Ismaël Govea et Carlos Orrantia ont passé quelques soirées particulièrement difficiles, ayant davantage l’air de portes tournantes que de rocs solides.
Si l’arrière-garde des Mexicains est particulièrement friable sur les centres, elle n’est pas forcément hyper à l’aise sur les combinaisons de passes. Ajoutez dans la balance quelques phases arrêtées qui tournent mal ça et là, l’une ou l’autre distraction et certains longs ballons mal négociés, ne pesant pas très lourd chacun mais affaiblissant encore le frêle esquif ensemble, et vous passez d’une défense plutôt mauvaise à la pire du championnat.
Vous le constatez, derrière, ça ne vole pas haut… au sens propre comme au sens figuré d’ailleurs. Car la défense de Santos Laguna a toutes les peines du monde dans les airs. Et pas seulement dans le geste final qui se termine en but ou en occasion, mais aussi sur les déviations qui se transforment en passe de finition.
Si on se fie à ce qu’on a vu depuis le début de l’année, Montréal fait face à un adversaire prenable. Toutefois, passer 90 minutes à l’attendre risque de mal tourner car, bien que dépourvue de buteur, son attaque reste dangereuse collectivement. En championnat, c’est cependant parfois Santos Laguna qui recule volontairement et il en paye le prix fort. En revanche, si Mihailovic et ses partenaires prennent des initiatives, savent exploiter une défense à la mise en place déficiente, faible dans les airs et mal à l’aise quand elle joue bas, la qualification pour le tour suivant n’est pas utopique.
Matthias Van Halst
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